Ces mots qui nous marquent : plongée au coeur de scènes filmiques qui m’ont inspirée par leur profondeur

Les dialogues et monologues sont, à mon sens, bien plus que de simples échanges de répliques dans un récit. Pour ce qui est de monologues, ils sont parfois le catalyseur de la performance d’un acteur/d’une actrice, révélant parfois certains talents. Ces discours sont le cœur battant des trames narratives, aussi, ils révèlent les sentiments les plus profonds des personnages et influencent notre perception en fonction de ce qu’il a pu nous être donné à voir à l’écran. En analysant quelques scènes marquantes de séries et de films, je vais tenter de percer à jour comment ces moments de vérité qui nous touchent tout particulièrement. 

La souffrance et la quête d'identité

“Je préférerais être le cadavre que j’étais plutôt que l’homme que je suis”

Dans Penny Dreadful, Caliban, la créature de Frankenstein, semble ressentir une douleur abyssale née de l’abandon et de la quête de sa propre identité, lui qui est revenu d’entre les morts dans la douleur. Son monologue poignant, nous montrant qu’il préférerait être mort plutôt que de se vouer à une existence monstrueuse et vile (caractéristiques qui lui sont attribuées de par son apparence physique), résonne avec une intensité particulière grâce à l’interprétation subtile de Rory Kinnear. 

“La vie me terrifie. Elle est dure, morne et éreintante”

De même, Mia Goth (interprétant la version jeune de Pearl), dans Pearl, An X-traordinary Origin Story, dévoile une complexité déconcertante, vacillant entre vulnérabilité et dangerosité. Son monologue final, où elle justifie ses actes tout en exprimant un désir intime et secret de reconnaissance, nous confronte à la noirceur de l’âme humaine, du moins, sans que cela soit sans empathie de la part du spectateur. Pour ma part, il m’a été difficile de ressentir une forme de compréhension de son personnage au regard de la situation familiale complexe dans laquelle elle se trouve (ce qui n’excuse en rien ses véritables crimes et ce qui la pousse à les commettre). A savoir, que c’est son lien avec sa propre mère qui a, en quelque sorte, contaminé son rapport au monde extérieur.

“Puisque personne ne reconnaît ses torts”

Ceci me permet d’effectuer un parallèle avec un autre chef-d’œuvre d’horreur psychologique d’A24, Hérédité d’Ari Aster. Tout comme dans Pearl, la figure maternelle y est centrale, mais revêt une dimension plus sinistre. Annie, interprétée de manière magistrale par Toni Collette, personnifie une matriarche maléfique dont l’influence perverse s’étend à toute sa famille. 

Alors que traditionnellement, c’est l’enfant qui dépend de la mère, ici, la dynamique est inversée : Annie, plongée dans la folie et le rejet, projette ses tourments sur son fils Peter, le transformant en bouc émissaire et le tient pour responsable de la tragédie qu’elle traverse (ce qui n’est pas totalement faux, de façon inhérente). 

Cette inversion des rôles, subtilement mise en scène par Ari Aster, souligne la perversion de la relation mère-fils et rend d’autant plus glaçante la descente aux enfers d’Annie.

L'amour et la complexité des relations

“Je t’aime depuis que je te connais, Jo, je n’y peux rien, tu as toujours été si bonne avec moi. J’ai essayé de te le montrer, mais tu ne me laisses pas le faire”

L’amour, sous toutes ses formes, est un thème récurrent dans les dialogues que j’ai choisi d’analyser. Dans Les Filles du Docteur March, Laurie et Jo expérimentent pendant de nombreuses années une amitié sur fond d’amour romantique du côté de Laurie (interprété par Timothée Chalamet). Cette conversation, durant laquelle Jo exprime son incapacité à répondre aux sentiments de Laurie ou à lui “convenir” en tant que femme, est le point culminant de leur relation. 

“Nous nous sommes fait beaucoup de bien l’un à l’autre”

De même, Marianne et Connell, dans Normal People, nous offrent une représentation réaliste et touchante de l’amour adolescent qui se poursuit jusqu’à l’âge adulte, contenant ses hauts et ses bas, ses joies et ses tristesses, avec l’implication d’un lien émotionnel qui les dépasse largement. Leur dialogue final, empreint de mélancolie et d’espoir, souligne la force de leur lien malgré la distance qui va les séparer. Se reverront-ils en tant qu’amants, ou en tant qu’amis ? C’était la question que tout spectateur a pu se poser en visionnant la série, et c’est aussi l’ouverture laissée tant par le roman que par cette adaptation télévisée.

L'addiction et la résilience

“Tu aimes l’idée d’être aimée”

Euphoria nous plonge dans la relation plus que tumultueuse entre Rue et Jules. Abordant des thèmes complexes, elle est aussi très controversée de par sa sexualisation exagérée des corps adolescents. Toutefois, il y a certains points sur lesquels il y a une force de proposition et une justesse dans l’écriture. Ce à quoi je peux me référer, ce serait tout d’abord la rupture brutale et déchirante entre Jules et Rue, mettant en exergue les dommages collatéraux de l’addiction et la complexité des relations amoureuses. Les performances de Zendaya et Hunter Schafer sont d’une intensité à couper le souffle, nous transportant au cœur de la douleur de ces deux personnages, que ce soit dans cette scène ou dans d’autres.

L'impact des performances

Ce n’est pas un secret que les acteurs/actrices ont, pour leur part, un rôle majeur dans la réussite de ces scènes. C’est eux qui surélèvent et subliment leurs interprétations nuancées, leurs regards, leurs intonations, tout concourt à donner vie aux personnages et à nous émouvoir. Que ce soit Rory Kinnear, Mia Goth, Saoirse Ronan, Paul Mescal, Zendaya ou Hunter Schafer, tous ont laissé une trace indélébile dans mes souvenirs. 

La scène des asperges dans Phantom Thread est aussi un moment charnière qui cristallise les tensions entre Reynolds (Daniel Day-Lewis) et Alma (Vicky Krieps). Le geste de Reynolds, qui jette délicatement une asperge de l’assiette d’Alma presque avec dédain, est chargé de symbolisme. L’asperge, fine et fragile, représente la pureté et la vulnérabilité d’Alma, que Reynolds cherche à modeler à son image. En rejetant l’asperge, il rejette par extension Alma elle-même, affirmant ainsi son pouvoir sur elle alors qu’elle avait “préparé” spécifiquement ces asperges pour lui. Cette scène souligne la nature obsessionnelle de Reynolds et son besoin de contrôler tout ce qui l’entoure, y compris les personnes qu’il aime. 

Alma tente ici de reprendre le contrôle qu’elle voit lui échapper à travers le dîner qu’ils partagent. Pour lui, Alma est une création, une œuvre d’art qu’il façonne à sa guise. Cependant, Alma résiste à cette domination, et cette scène marque le début d’une lutte de pouvoir subtile qui va se jouer tout au long du film entre les deux protagonistes. On le perçoit à la fin du dialogue quand Reynolds demande à Alma de “retourner là d’où elle vient”.

Au-delà des mots

Ces dialogues et monologues prouvent à quel point le langage peut être un outil puissant pour sonder les profondeurs de l’âme humaine. Ils nous poussent aussi à pousser nos réflexions plus loin, à ne pas survoler ce que l’on peut être amené à penser de prime abord. J’espère que cet article vous a plu, et je vous remercie de m’avoir lu ! Si vous souhaitez laisser un commentaire, je suis toujours preneuse !

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